Pendant ce temps-là, des gens meurent au soleil …
C’est le printemps ! Avril a pris ses quartiers sous le soleil, et les meutes vociférantes qui descendaient dans la rue s’aligner en rangs d’oignons sous des calicots au contenu sémantique pour le moins limité ont replié leurs vaillants oripeaux antimondialistes, antiaméricains et anti-guerre et sont retournés dans les jardins profiter de la douceur du climat.
Pendant ce temps, à l’autre bout du monde, de pauvres gens subissent une occupation indigne, voient leurs droits bafoués, sont emprisonnés, jugés sommairement et exécutés. Et que font nos contestataires d’opérette ? Ils détournent le regard, ont un silence embarrassé, puis se lancent dans de complexes et futiles analyses des possibles scénarios de transition de l’Irak vers la démocratie. C’est que la situation met ces malheureux apôtres de la contestation bien-pensante dans une dangereuse position. Comment, ce pays où la médecine et l’enseignement sont gratuits serait une dictature ? Non non, ce n’est pas possible, vérifiez vos sources, mon bon ami, tout le monde sait bien que le communisme veut le bien du peuple, pas sa mort…
Et nos politiciens, d’ordinaire si prompts à s’emparer des ondes pour diffuser leur indignation de bon aloi, de multiplier les visites de courtoisie, les missions commerciales, et d’aller serrer chaudement la main d’un vieux barbu en uniforme qui leur sert un petit mojito bien tassé pour accompagner le cigare qu’il vient de leur offrir… Certains vont même jusqu’à profiter des joies d’une promenade à motocyclette sur le Malecon, indifférents à la souffrance de ce peuple qui n’a même plus le droit d’aller pêcher le poisson* dans ces eaux que notre baderne pachydermique longe juché sur son bolide vrombissant.
Ah, mais vous vous trompez, mon cher Constantin, ça ne va pas se passer comme ça ! La Commission des Droits de l’Homme de l’Organisation des Nations Unies va s’en occuper, et nous mitonne une condamnation ferme et définitive de la vague de répression qui frappe ces malheureux dissidents cubains. Mea culpa, comment donc n’y ai-je pas songé plus tôt ?. La Lybie, qui préside cette commission, ne pourra que condamner cette intolérable dictature ! Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, je peux retourner siroter un vieux malt à l’ombre des lilas en écoutant Buena Vista Social Club. Tiens, au fait, saviez-vous pourquoi Ibrahim Ferrer, ce chanteur septuagénaire à la voix si douce, cirait des chaussures dans la rue pour gagner sa croûte avant que Ry Cooder ne débarque à Cuba pour y enregistrer ce disque ? Parce que c’était un chanteur de musique populaire : la musique populaire cubaine et le jazz sont des musiques subversives et capitalistes, et à ce titre interdites jusqu’il y a peu. Et d’ailleurs, ces musiques sont jouées par des nègres ou des métis, quelle horreur** ! La seule musique qui vale la peine d’être enseignée dans les académies cubaines et jouée dans les salles de concert, c’est la musique classique russe. Et d’ailleurs, jusqu’à la chute du mur et même au-delà, les professeurs de musique à Cuba étaient russes. Ca se chante comment en Cubain, la lutte finale ?
* c’est le gouvernement cubain qui a le monopole de la pêche dans les eaux territoriales
** le racisme à Cuba, contrairement à ce que les bien-pensants tentent de nous faire accroire, est bien réel. A tel point que « Irakere »,un des groupes de musique cubaine les plus populaires, a écrit un morceau dénonçant cet état de fait, « Naci Moreno » (je suis né noir)
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