4.5.05

Typologie du collectiviste de base

A force de débattre dans un forum dont la qualité des intervenants permet des débats calmes, argumentés et fort bien documentés, j'avais fini par oublier à quel point de nos jours un grand nombre de personnes prennent les débats pour une foire d'empoigne où celui qui crie le plus fort ou lance l'insulte la plus cinglante finit par occuper le haut du pavé. Mes récents démêlés avec un rustre collectiviste sur les commentaires de l'excellent Bruxelles, ma ville ont fini par me rappeler cette dure réalité. Ce sombre abruti, dont l'argument le plus percutant - à défaut d'être pertinent - fut sans conteste "va te faire brouter par un gnou, concon", incarne à lui seul tous les travers de la mauvaise foi crasse et mal informée. Ses exaspérantes sorties ont cependant eu une conséquence intéressante : elles ont ranimé chez votre serviteur une réflexion sur les caractéristiques du collectiviste de base et son comportement dans les débats. C'est à dessein que j'emploie le terme "collectiviste" en lieu et place de gauchiste, car cela permet d'inclure dans la réflexion ceux que j'appellerai les "gauchistes de droite" : néoconservateurs, atlantistes et autres partisans du "Welfare and Warfare State" dont le mercantilisme, le protectionnisme et la volonté de s'immiscer dans la vie privée des individus n'ont rien à envier à la "solidarité responsable, durable et citoyenne" de la gauche caviar. Il me semble en effet qu'en-dehors du "conformisme rugissant" des représentants de la gauche caviar altermondialiste, leurs schémas mentaux sont à peu près identiques.

Nous commencerons d'ailleurs notre typologie du collectiviste de base par ce trait distinctif du gauchiste. Le conformisme rugissant se caractérise par l'adoption sans arrière-pensée ou esprit critique des révoltes clé sur porte proposées par les média ou les ONG portant le label "citoyen" : altermondialisme, antiaméricanisme primaire, haine des OGM, défense du principe de précaution, et surtout critique du prétendu "ultralibéralisme" de Chirac, de Berlusconi ou de Georges W. Bush. La dernière révolte citée est une des plus éclatantes réussites des adversaires du libéralisme, et l'une des preuves les plus patentes de l'absence totale d'esprit critique chez ceux qui l'adoptent. Indépendamment de la sympathie ou de la haine que l'on peut éprouver pour la philosophie libérale, étiqueter "libérales" les politiques menées par messieurs Bush, Chirac et Berlusconi dénote une méconnaissance profonde de ce qu'est le libéralisme. Prenons Chirac, par exemple. Peut-on sérieusement qualifier d'ultralibéralisme son protectionnisme agressif (voir la dernière sortie de la France sur les importations de textiles chinois) et sa défense bec et ongles des subventions européennes à l'agriculture de libéralisme, alors que les libéraux sont pour la suppression des barrières à l'importation et à l'exportation ? Quant à George W. Bush, que dire des politiques protectionnistes menées par son administration (textiles, acier), de l'augmentation sous son mandat des subsides à l'agriculture (et notamment à la culture du coton), de la croissance exponentielle des dépenses gouvernementales à laquelle il préside et de sa guerre d'agression contre l'Irak qu'il fait financer par les contribuables américains ? Sont-ce là les caractéristiques du libéralisme ? Un esprit un tant soit peu critique y verra plutôt mercantilisme, protectionnisme, impérialisme et soumission à divers groupements d'intérêt. Quant à Berlusconi, qui se sert de l'Etat pour satisfaire ses intérêts personnels au dépens du reste de la population, qualifier de libéral cet affairiste opportuniste est carrément ridicule. Un autre exemple encore : combien de fois ai-je déjà entendu critiquer le système britannique d'assurance-maladie, le National Health Service, lequel est encore plus étatisé qu'en Belgique ou en France (si si, c'est possible), non pour sa totale inefficacité mais parce qu'il serait la conséquence d'une politique ultralibérale. J'aimerais bien qu'une âme charitable m'explique ce qu'il y a de libéral à nationaliser les soins de santé.

La grande victoire des collectivistes, c'est celle-là : d'avoir réussi à créer et à entretenir la confusion sur ce qu'est le libéralisme. Il importe à présent que tous les vrais libéraux se mettent à l'ouvrage pour rétablir la vérité sur ce qu'est vraiment le libéralisme : une philosophie tant économique que politique, qui prône la liberté et la responsabilité individuelle, le respect de la propriété et la poursuite paisible par chacun des activités de son choix dans le respect des autres.