Chroniques de l'absurde
Armand Van Piperzele se lève tôt ce matin. Les transports en commun sont en grève et il lui faudra marcher jusqu'à son lieu de travail aujourd'hui. A la radio téléguidée bolchévique francolâtre (RTBF), un syndicaliste s'insurge contre la dégradation de ses conditions de travail, tout en réclamant la solidarité des milliers de navetteurs bloqués dans les embouteillages par l'action de grève qu'il soutient.
Au carrefour Léonard, les habituels embarras de circulation ont pris des proportions dantesques. Le "ministre de la mobilité" - admirez l'inventivité de nos édiles en matière d'appellations pompeuses - vient en effet de lancer l'application du nouveau "plan de mobilité" bruxellois. Désormais, tourner à gauche à ce carrefour est impossible : le conducteur désirant effectuer cette manoeuvre devra tourner à droite et faire demi-tour cinq kilomètres plus loin. Heureusement, se dit Armand, cela ne durera pas. Les autorités promettent en effet des travaux de transformation du carrefour et la mesure actuelle sera d'application en attendant la fin des travaux, prévue pour 2015. Heureusement, Armand habite Bruxelles. Il se dirige vers sa voiture, qu'il a garée à deux kilomètres de chez lui. Les autorités communales procèdent en effet à la réfection des trottoirs de sa rue. L'entièreté du tronçon est couvert de panneaux "stationnement interdit" même si les travaux se concentrent actuellement sur les 30 premiers mètres de trottoir. Cent voitures à recaser dans les rues avoisinantes, cela ne se fait pas sans mal.
En chemin, Armand se rappelle qu'il doit demander une demi-journée de congé à son supérieur. Sa ligne téléphonique est en dérangement et Belgacom refuse de se déplacer en-dehors des heures de bureau à moins qu'Armand ne paie un supplément. Ce n'est pas si grave, il profitera de ce demi-jour de congé pour se rendre à la porte chercher ce recommandé qui l'attend depuis trois jours. Il faut dire que la poste ouvre de 10 heures à 15 heures avec une pause d'une heure à midi.
8h25. Armand vient de tomber sur un nouvel embouteillage. Il l'avait complètement oublié, les étudiants des écoles supérieures ont annoncé hier leur intention de bloquer le carrefour de la place Madou. Aujourd'hui, ils sont en place, avec leurs sirènes et leurs calicots, pour réclamer de nouveaux moyens pour les Hautes Ecoles.
Armand finit enfin par arriver à l'entrée de la banque où il travaille. Et là, surprise, un piquet de grève bloque l'accès au bâtiment. Les syndicats du secteur bancaire, outragés par les plantureux bénéfices réalisés l'année passée, exigent une revalorisation de leurs barèmes salariaux. Apparemment, ils ont séquestré la direction dans les bureaux et ne la relâcheront pas avant qu'un accord ne soit atteint.
Il est neuf heures en Belgicanie et c'est un jour comme les autres qui commence.
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