To protect and to serve (part III)
Un gentil lecteur vient de me signaler un article paru sur le site en ligne de "La Dernière Heure". On y relate de nouveaux faits de violences policières à caractère raciste qui auraient eu lieu dans la zone de police de Schaerbeek. Le journaliste insiste - avec raison - sur le fait qu'il n'était pas présent au moment du présumé passage à tabac et que le doute est toujours de mise.
Je me permets cependant de lever une partie du caveat de la DH : l'histoire me semble plus que plausible. En effet, la description des faits présente de nombreuses similitudes avec un témoignage qui m'est parvenu il y a peu et impliquait des pandores du même commissariat. Si ce n'est que la victime des coups et des injures avait été frappée avec un bottin téléphonique.
Si l'on met en parallèle ces deux cas avec la mésaventure du jeune étudiant que j'ai également contée sur ce petit coin de toile, nous pouvons dégager le synopsis d'un cas typique de violences policières.
La victime, seule ou accompagnée, se trouve confrontée d'une façon ou d'une autre à la police alors qu'elle circule sur la voie publique de façon pacifique. Pour un motif quelconque et en général bénin, un agent de police l'interpelle avec agressivité. La victime a le malheur d'émettre une remarque sur le ton employé ou de contester l'interprétation des faits par le policier. Même si c'est fait avec politesse, c'en est apparemment trop pour le pandore qui procède - avec brutalité - à l'interpellation de l'importun(e). Une fois au commissariat, c'est la passage à tabac éventuellement - mais pas nécessairement - agrémenté d'insultes racistes. Ensuite, sous la menace, la victime est forcée de signer un procès-verbal dans lequel elle "reconnaît" avoir agressé les forces de l'ordre et résisté à son interpellation. La menace employée est toujours la même : si l'infortuné(e) refuse de signer ce procès-verbal arrangé, les policiers le(la) garderont plus longtemps au commissariat et les coups recommenceront.
Chers lecteurs, vous voilà prévenus : si un policier vous adresse la parole d'un ton peu amène, faites-vous humbles et doux comme de gentils petits moutons, l'intégrité de votre épiderme est à ce prix dans notre riante démocratie que le monde entier nous envie. Et ne faites surtout pas valoir le fait que vous "avez des droits". On vous répondrait d'un air goguenard que "vous vous croyez sans doute aux Etats-Unis".
7 Commentaires:
Je sais qu'il est de bon ton pour les anarchistes, même capitalistes, de dénoncer la racaille policière, je suis persuadé que c'est faire oeuvre utile que de dénoncer les dérives inacceptables des policers qui abusent de leur pouvoir, mais ne croyez-vous pas que vous cédez un peu facilement dans une dénonciation systématique qui risque d'être dommageable à l'ensemble des policiers ?
Votre dernier paragraphe me semble on ne peut plus collectiviste. Un comble, non ? Je vous ai connu mieux inspiré.
Si la police faisait correctement son travail, il n'y aurait rien à dénoncer.
Je vous ai connu plus au fait de ce qui fonde l'anarcho-capitalisme, mon cher Harald. Vous savez comme moi que les anarcaps n'ont aucun problème avec l'autorité du moment que cette dernière s'exerce dans les limites d'un contrat où les droits et obligations de chacun sont spécifiés. Rien de tel ici, il ne s'agit que de la violence exercée par une bande de tristes sires à qui l'Etat a octroyé le monopole de l'usage légal de la violence (et des armes à feu). En contrepartie de ce monopole, la police est censée protéger le citoyen, pas le passer à tabac pour un oui ou pour un non. Si c'était un agent d'une firme de sécurité privée chargé de la surveillance d'un bâtiment qui s'était ainsi laissé aller à frapper un civil innocent, il y aurait eu à gauche comme à droite une levée de boucliers contre "l'intolérable dérive du privé". Et quoi, quand c'est un flic qui se rend coupable, il faut l'excuser, il faut passer le fait sous silence pour ne pas heurter la morale bien-pensante ?
Sachez, mon cher Harald, que les récits que j'ai eu à entendre m'ont bouleversé et écoeuré. Jusque là, je considérais la police étatique comme un mal nécessaire. Il a fallu que deux pandores s'en prennent à un de mes élèves pour que je comprenne que derrière les jolies petites théories sur la violence de l'Etat, il y a les beignes que distribuent les agents de l'Etat sur les joues des citoyens.
Quant à mon dernier paragraphe, il se voulait bien sûr ironique. Un comble non ? Je vous ai connu plus subtil.
Bah, j'ai été aussi fin que vous dans le fond. Il est toujours facile sous prétexte d'énergumènes qui outrepassent leurs droits de salir toute une profession. J'avoue avoir été vif mais j'ai toujours du mal à accepter les tirs groupés alors que seuls quelques responsables sont à mettre en cause. Si je devais salir tous les jeunes de banlieue à cause des 2 ou 3% d'entre eux qui sont eux de vraies ordures il y aurait déjà eu une levée massive de boucliers.
Je le dis et je le répète, dénoncer les agissements identifiés c'est faire oeuvre utile, généraliser c'est ouvrir une porte dangereuse. Pour ma part, mes collègues savent que je ne les couvrirais pas.
Je ne généralise pas, au contraire, je me focaliste sur la zone de police qui couvre la commune de Schaerbeek, celle dont la Dernière Heure fait mention et dans laquelle ont eu lieu les abus qui m'ont été racontés.
D'autre part, je mentionne un rapport d'Amnesty International sur la Belgique qui parle des violences policières (qu'elles soient ou non à caractère raciste) comme d'un problème réellement préoccupant en Belgique.
Cela me permet d'en déduire que les faits sont loin d'être isolés. Par ailleurs, j'ai également eu vent des problèmes que le Parquet de Bruxelles connaît dans le traitement des dossiers d'instructions concernant des violences policières.
Tout se base sur des faits, non sur des spéculations. Ma conclusion personnelle est que j'ai la sinistre impression que, contrairement à ce que vous affirmez, il y a en Belgique 2 à 3% de policiers honnêtes et compétents, le reste étant constitué d'une masse d'incompétents et d'une série de crétins congénitaux, racistes et violents. Je l'avoue, je force peut-être un peu le trait, mais le problème est très peu discuté dans les média et les gens s'en fichent, préférant, comme certains des interlocuteurs sur les commentaires de mes précédents posts, se cacher derrière l'argument que "les honnêtes gens n'ont rien à craindre". Et bien justement si, car les victimes des violences qui m'ont été contéesce sont précisément des honnêtes gens.
Alors si tel est le cas, il me semble que des actions doivent être menées pour mobiliser l'opinion publique. Ne pensez vous pas que des groupes comme justement l'AGLLB par exemple pourraient fort bien passer de la réflexion à l'action ?
Vous aussi vous pourriez agir, remarquez bien. En ce qui concerne l'AGLLB, nous réfléchissons depuis longtemps à ce qui constituerait une forme efficace, mais ludique et pédagogique, d'action. Ces réflexions porteront un jour leurs fruits. D'ici là, je me concentre sur le net et ce petit coin de toile. Et sur l'aide concrète que j'ai apportée à ceux qui sont venus me la demander pour poursuivre les policiers en justice.
En tant que flic français, je ne vois pas trop ce que je pourais faire. Comme je vous l'ai dit, en ce qui concerne mes collègues, ils savent que je ne les couvrirait pas. C'est peut être une position indigne d'un esthète de la bavure comme aime à le dire votre "pote", mais c'est la mienne. Notez que ce n'était pas du tout un reproche de ma part et que j'apprécie les efforts que vous faites en prodiguant conseils et soutien à ceux qui en ont besoin.
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