5.7.03

Le grand mensonge




Une des réussites les plus éclatantes de la propagande collectiviste est sans conteste d'avoir fait gober au plus grand nombre - et même à certaines "élites intellectuelles" autoproclamées - que la mondialisation du commerce était une menace pour les pays pauvres, en particulier ceux d'Afrique subsaharienne. Il n'en est bien sûr rien, que du contraire. Seulement, affirmer cela au grand jour, c'est mettre les pieds dans un plat que l'Union Européenne, les Etats-Unis et le Japon ont bataillé ferme pour soustraire à la juridiction de l'Organisation Mondiale du Commerce : celui du protectionnisme en matière d'agriculture.


Un petit coup d'oeil sur un article daté du 12 février 99 et extrait des archives du Cato Institute, un des think-tanks libertariens les plus respectés nous apprend d'entrée de jeu que les droits de douane moyens sur les produits soumis à l'OMC sont de 5%, alors que les droits de douane moyens sur les produits agricoles sont de 40%, et que ce chiffre masque des plafonds astronomiques de 300% sur certains produits ! Les responsables de cet état de fait sont principalement les trois pays précités. Parallèlement à ces barrières douanières, l'agriculture est très lourdement subsidiée dans chacun de ces Etats. Ainsi, la célèbre Politique Agricole Commune des Quinze engloutit à elle seule plus de 50 milliards d'euros, soit la moitié du budget européen. Ces subsides, qui augmentent plus que sensiblement les revenus des agriculteurs européens, contribuent également à maintenir les prix agricoles artificiellement bas sur les marchés internationaux. Bien entendu, comme les Etats-Unis - avec un budget d'environ 19 milliards de dollars - et le Japon font de même, les prix du marché sont actuellement en-dessous du niveau où les pays d'Afrique ou d'Amérique du Sud pourraient être tentés de produire quoi que ce soit à destination de nos marchés, d'autant que les tarifs douaniers prohibitifs achèveront de dissuader ceux qui n'auraient pas encore compris le message. Autrement dit, alors que devant les caméras les politiciens européens et américains ne parlent que d'aider le Tiers-Monde, ils les poignardent dans le dos. Bel exemple de schizophrénie, vous ne trouvez pas.


Ceux d'entre vous que le sort des pays du Tiers-Monde n'émeut pas plus que cela seront peut-être plus sensibles à l'argument de l'égoïsme. Le libéralisation du commerce de produits agricoles aurait deux conséquences immédiates : abaissement drastique des barrières douanières, et suppression des subsides à l'agriculture. Non seulement, ces subsides absorbent un montant colossal prélevé auprès du contribuable européen - et représenteraient donc un gain appréciable sur la pression fiscale en Europe - mais en plus, conjugués aux droits de douane, ils privent le consommateur européen de la possibilité d'importer des produits moins cher et de meilleure qualité de pays où le climat est plus propice à leur culture. La globalisation permettrait donc à la fois de baisser le coût de la nourriture pour le consommateur européen, mais aussi d'offrir un marché aux produits agricoles issus d'Afrique - par exemple - et donc de procurer une source de revenus appréciable à ces pays qui leur permettrait de commencer leur ascension vers le progrès économique et social. C'est ce qu'on appelle en anglais un win-win situation .


Et ce n'est pas tout ! Les subsides à l'agriculture ont favorisé dans les pays industrialisés une agriculture intensive particulièrement néfaste pour l'environnement. Pensez aux tonnes d'engrais - qu'ils soit chimiques ou animaux, la pollution des nappes phréatiques par les nitrates est la même - déversées sur les champs, aux millions de litres de pesticides et de fongicides dont on les arrose, aux trois ou quatre récoltes par an imposées à un pauvre champ innocent. Pensez aux milliers de tonnes de carburant dépensées pour chauffer les serres dans lesquelles mûrissent des fruits et des légumes qu'on aurait avantageusement pu produire plus au sud en plein air. Evidemment, tant nos édiles que José Bovin et ses sbires se gardent bien de le mentionner dans leurs discours !!


Et tant que nous sommes à parler de José Bovin et des syndicats agricoles, je vous ai gardé le meilleur pour la fin. Dans un article daté du 19 juin 2003, The Economist nous révèle que 80% des subsides à l'agriculture vont aux 20% de fermiers européens qui possèdent les plus grandes fermes. Comment dès lors accorder le moindre crédit aux syndicats paysans quand ils disent défendre "la petite exploitation" contre la grosse multinationale ? C'est non seulement un mensonge à l'opinion publique, ce qui est déjà grave en soi, mais surtout un affront pour les petits agriculteurs qui accordent leur soutien à Bovin et ses sbires. Juste pour remettre les choses en perspective, permettez-moi également de vous rappeler que les agriculteurs européens représentent moins de 5% de la population. Trouvez-vous normal qu'on leur consacre 50% du budget annuel total de l'Union ? C'est un merveilleux cas de racket. Fermons les robinets et les voilà qui déversent leurs tomates subsidiées sur les routes. Tout ça pour continuer à vivre aux crochets des 95 autres pour cent de la population. Sans compter tous les agriculteurs du Tiers-Monde à qui José Bovin et ses acolytes entendent bien empêcher pour longtemps encore l'accès à leur marché, tout en prétendant vouloir les aider. C'est monstrueux de cynisme.

La prochaine fois que vous entendez quelqu'un vous parler des torts que ferait la mondialisation du commerce au pauvre paysan guatémaltèque là-bas tout là-bas, riez-lui au nez. C'est la seule réponse civilisée que méritent de telles fadaises.





Pour ceux que le sujet des effets de la mondialisation sur les pays africains intéressent, je vous suggère également un excellent article publié récemment sur le site du Québecquois Libre.