17.6.03

President Evil…




L’Empire de Constantin vous proposait il y a quelques semaines une ballade du côté de la Tunisie, cette dictature méditerranéenne où les opposants sont tranquillement mis en prison et torturés afin de ne pas déranger le tourisme ou la quiétude du président Ben Ali. Une gentille lectrice m’avait d’ailleurs fait part à l’époque des mésaventures de l’ancien maire de Tunis, mis en prison pour avoir critiqué le régime. Dans sa geôle, en guise de punition sans doute, ses gardiens se sont mis en tête de lui prouver à quel point le régime était excellent pour la santé, et quand, quatre ans plus tard, l’action d’Amnesty International parvenait enfin à le faire libérer, le pauvre hère avait perdu 35 kg. Ce qui prouve que Ben Ali est bien plus efficace que Montignac. C’est sans doute le climat …

Il est un autre pays avec lequel la France entretient sans honte des relations amicales alors que les manifestations y sont réprimées à balles réelles (une technique fort efficace pour disperser la foule), que les commerçants qui font grève se voient retirer leur licence d’exploitation, et que le candidat de l’opposition aux récentes élections présidentielles fut inculpé après les élections de haute trahison et de quelques autres chefs d’accusation plus ou moins fantaisistes. Etant donné que les miliciens du président ont récemment passé à tabac le dernier juge de la Cour Suprême qui s’obstinait encore à déclarer anticonstitutionnelles les lois de plus en plus frafelues votées par le Parlement (où l’opposition brille par son absence), forçant ce pauvre homme à démissionner, je suppose que ce brave Morgan Tsvangirai risque de passer quelque temps à l’ombre. Ce qui, il faut bien le reconnaître, constitue une touchante attention de la part de Robert Mugabe, car le soleil frappe fort sous ces latitudes. Les gêoliers aussi d’ailleurs.

Au Zimbabwe, puisque c’est bien de l’ancienne Rhodésie qu’il s’agit, le président a décidé de faire mieux que Benali : il a mis toute la population au régime. Sa remarquable politique de « redistribution des terres » - en gros, confisquer les fermes des grands propriétaires terriens sous prétexte qu’ils n’ont pas la bonne couleur et les redistribuer à ses miliciens, lesquels sont aussi doués pour l’agriculture que votre serviteur pour la balle-pelote – a permis d'atteindre des résultats surprenants : en à peine cinq ans, le Zimbabwe est passé du statut d’exportateur net de céréales à celui de client des programmes européens et américains de lutte contre la famine.

Ceci dit, j’aimerais en toute humilité tirer mon chapeau à Robert Mugabe. Voilà au moins un dictateur qui sait y faire : les pressions internationales ? Rien à cirer. L’opposition ? Pas grave, il a des miliciens qui adorent ligoter les opposants dans du filde fer barbelé avant de les torturer un peu. Les manifestations ? Il y a deux semaines, il les a fait disperser à balles réelles par l’armée. Maintenant, quand les Zimbabwéens se rassemblent, il les fait survoler par des hélicoptères de combat équipés de mitrailleuses, technique d’intimidation ma foi fort efficace. Tout cela dans la discrétion la plus totale, puisqu’il n’y a plus de journaux d’opposition au Zimbabwe (le dernier a brûlé il y a quelques mois) et que le dernier correspondant étranger, qui travaillait pour « The Economist » a été expulsé manu militari malgré un jugement de la Cour Suprême qui déclarait son expulsion illégale (gageons que voilà un juge qui n’a pas dû rigoler les jours qui ont suivi le verdict).

Pendant ce temps-là, Grace Mugabe profite des voyages diplomatiques de son dictatorial époux pour faire son shopping à Paris. Elle a raison, c’est de plus en plus difficile de trouver un magasin ouvert à Harare.


Dernières nouvelles : outré par les déclarations mensongères de la presse colonialiste, Robert Mugabe vient d'ouvrir un site web où il racontera la vérité. Il se sent très déprimé par cette campagne de diffamation, mais vous pouvez lui remonter le moral en participant au petit sondage sur sa page d'accueil.