L'exception française
Une fois n'est pas coutume, je ne puis m'empêcher de regarder avec un amusement teinté de compassion le cours des événements au Sud de notre plat pays. Le "pays du pinard des fromages qui puent" - pour reprendre l'expression de Monsieur Sylvestre - semble empêtré dans une épidémie de SRAS* qui paralyse le pays depuis plusieurs mois.
Si je comprends bien, tout a commencé lorsque le gouvernement Raffarin a tenté de faire passer une réformette du système des pensions qui avait pour objectif d'éviter de foncer droit dans le mur, notamment en atténuant quelque peu (pas assez cependant d'après Alain Madelin) les privilèges scandaleux dont jouissent les fonctionnaires. Là-dessus, les syndicats du service public, cheminots et enseignants en tête, se sont mis en grève. Paralysie du pays et potaches en congé, jusque là rien de neuf. J'ai suivi avec un profond ennui le "débat citoyen" qui a suivi, dans lequel on reprochait également au gouvernement une mesure votée quelques semaines auparavant dans l'indifférence générale - quelque chose comme la décentralisation de la hiérarchie dans l'enseignement. Suivirent les habituels cortèges et "rassemblements citoyens, solidaires et festifs" auxquels la gauche nous a habitués, et les interviews de crétins lobotomisés bloqués dans leurs voitures par les grèves de la SNCF et les manifestations qui surgissaient un peu partout, interviews où lesdits crétins affirmaient "comprendre les grévistes".
C'est à peu près à ce moment-là que mon intérêt pour l'Hexagone se réveille. L'association libérale française "Liberté, j'écris ton nom" organise une grande manifestation pour protester contre le blocage du pays par les syndicats. Voici le texte du discours prononcé à cette occasion par Sabine Herold, la jeune et courageuse porte-parole de l'association. Contre toute attente, les victimes du blocus se sont rendues en masse au lieu de rendez-vous pour exprimer leur ras-le-bol, sans se faire arrêter par des syndicalistes ennemis de la liberté d'expression quand elle est utilisée pour défendre un autre point de vue que le leur. . C'est fort heureux, car mon ami Zek narrait peu avant ses mésaventures lors d'une tentative similaire à Toulouse.
Peu après, le mouvement syndical s'essouffle et le gouvernement Raffarin poursuit son travail. Fort bien, me dis-je, nos voisins du Sud reviennent à plus de bon sens. Il y aurait beaucoup à dire sur les insuffisances de la réforme en question - je vous engage d'ailleurs vivement à lire le résumé du livre de Madelin sur la question que donne Vincent Bénard sur le blog "Liberté" - mais voici au moins une victoire de la démocratie sur le chantage.
Quelques jours à peine ont passé et voilà que nos amis les "intermittents du spectacle" se mettent à leur tour en grève. Vous me direz qu'en tant qu'intermittents ça ne doit pas les changer beaucoup de ne pas travailler, mais bon, il paraît que la culture est en danger. Alors, avec leur bonne vieille logique syndicale (artistes, oui, mais syndiqués) ils menacent de paralyser toutes les activités culturelles en France, dont le célèbre festival d'Avignon. A en croire les responsables dudit festival, si ce blocage a lieu, non seulement une kyrielle de petites compagnies théâtrales seront obligées de mettre la clé sous le paillasson, renvoyant par la même leurs "intermittents" aux Assedic, mais en outre l'édition suivante du festival ne sera pas organisée car "l'argent des subsides de l'an prochain servira à couvrir le déficit dû à l'annulation". Donc non seulement grâce à leurs grèves les "intermittents" retourneront vivre au crochets du contribuable via leurs allocations de chômage, mais en plus le cochon de payeur verra son argent englouti pour couvrir le déficit causé par les grévistes. Remarquez, si le festival avait quand même été organisé, c'est aussi avec l'argent des contribuables qu'on aurait payé les comédiens. Je ne reviendrai pas sur l'inanité des arguments des grévistes, mon ami Zek (encore lui) s'en est déjà chargé dans sa dernière chronique.
Ces pantalonnades à répétition doivent sans doute bien faire rire nos cousins d'Outre-Manche et d'Outre-Atlantique, mais leurs moqueries n'atteignent pas les Français, car elles émanent de pays où "l'ultralibéralisme triomphe". Quoi qu'il en soit, elles m'ont bien amusé également. Et attristé aussi, car j'y vois une préfiguration de la situation en Communauté Française Wallonie Bruxelles de Belgique (enfin, un truc dans le genre) dans quelques années. D'ailleurs, les cheminots n'ont pas hésité à faire grève le jour du festival de Torhout-Werchter, preuve s'il en était besoin que le syndicalisme n'est pas si festif qu'il veut bien le faire croire.
* Syndicalisme Revendicatif Assommant et Stupide
Je m'en voudrais de ne pas vous recommander un excellent article sur la dérive collectiviste en France. Mutatis mutandis, il faut bien avouer que la situation belge n'est guère plus brillante.
0 Commentaires:
Enregistrer un commentaire
<< Retour à l'accueil