5.10.03

Deux poids, deux mesures ?

L'antiaméricanisme primaire - qui dis-je primitif - de la radio-télévision bolchévique a atteint de nouveaux sommets cette semaine. Les téléspectateurs avides de journaux télévisés auront sans doute remarqué le petit reportage qui est passé il y a deux ou trois jours sur la procédure de recall en Californie. Avec la mauvaise foi et le parti pris qui caractérisent la majorité des journalistes ertébéens dès qu'il s'agit de nos cousins d'Outre-Atlantique, ce reportage outrageusement simplificateur nous présentait la procédure de recall comme une simple élection ou seuls deux candidats s'affrontent : un acteur musclé et une star de l'industrie pronographique. En guise de cerise sur cet indigeste gâteau de propagande antiaméricaine, le présentateur du journal télévisé, petit sourire de mépris amusé au lèvres, ajoute finement : "ce doit être ce qu'on appelle le bon goût américain".

Evidemment. Que des élections soient à ce point libres qu'il n'est pas nécessaire d'être dans les bonnes grâces d'un chef de parti pour avoir le droit de s'y présenter est sans doute un concept trop difficile à saisir au moyen des deux malheureux neurones de cet infâme valet du service public. Un homme qui a rampé toute sa vie dans l'ombre de la particratie, brandissant sa carte comme un faire-valoir aux époques où le parti dont il était membre régnait en maître, tentant servilement de se faire oublier durant les années sombres où un autre camp dominait, peut difficilement - j'imagine - concevoir d'élever le débat et de prendre une vue d'ensemble de la circulation, le plafond de sa propre médiocrité ancillaire empêchant probablement le décollage ...

Soit. Laissons-là un instant ce reportage lamentable et le malfaisant imbécile qui l'a commenté avec morgue et intéressons-nous de plus près aux préjugés qui empêchent nos journalistes francolâtres de considérer avec sérieux la candidature de monsieur Schwarzenegger aux élections qui prendront place si la procédure de recall aboutit. Assurément, ce qui doit les déranger est le fait qu'un acteur se lance dans la politique. "Pourquoi diable un saltimbanque se mêle-t-il donc de ces choses-là au lieu de laisser ceux qui ont le bagage intellectuel nécessaire s'en occuper ?" est probablement la snobinarde réaction d'une majorité d'intellectuels en pantoufles qui s'imaginent que le Monde Diplomatique est un journal sérieux et impartial. A première vue, l'argument peut sembler digne de considération, mais un examen approfondi de la situation politique en francophonie socialiste a tôt fait de le démonter. En effet, quand une écervelée à la forte poitrine et aux lèvres pulpeuses se lance dans des diatribes gauchisantes en prétendant maîtriser dans son entière complexité la question de l'immigration illégale en France, tout le monde applaudit et la croit. Quand un "comique" - à l'humour plutôt douteux et plein de haine, d'ailleurs - présente sa candidature aux élections présidentielles, chacun se réjouit. Vous avez dit "bizarre" ?

L'explication est simple : un artiste a tout à fait le droit de faire de la politique avec la bénédiction de l'establishment journalistico-intellectuelle pour autant qu'il prenne bien garde à n'exprimer que les opinions de la gauche bien-pensante. Il est vrai qu'à la lecture du programme de celui qu'on appelle là-bas "gubernator", le doute n'est plus permis : il est pour la diminution des impôts et insiste sur l'importance de l'initiative privée dans la santé de l'économie.

Est-ce une raison pour le salir ? Plus que probablement. Reagan, en son temps, fut la cible du même genre d'attaques sous la ceinture. C'était dans son cas d'autant plus injustifié qu'il était depuis des années chroniqueur dans diverses revues politiques outre-atlantique. Finalement, ce qui me rassure dans cette histoire, c'est que l'ami Schwarzie n'a cure de tout cela. Il est candidat au poste de gouverneur de l'Etat le plus dynamique des Etats-Unis, et l'opinion de quelques journaleux crève-la-faim mais bien-pensants issus d'une démocratie bananière collectiviste d'outre-atlantique lui importe bien peu.