La liberté, c’est l’esclavage
Par un pluvieux matin de mai, frétillant bien que légèrement incommodé par l’heure indue et les premiers symptômes d’un lendemain de soirée passée à refaire le monde autour de moultes cervoises libertariennes, je me penche sur ma boîte aux lettres, prêt à recueillir les plis que le fonctionnaire alcoolique, crasseux et syndiqué à la solde de l’organisme étatiste malfaisant et inefficace qui s’est arrogé le monopole de la distribution du courrier sous le fumeux alibi du service public y a glissés*.
Parmi la correspondance habituelle se trouvait une enveloppe brune marquée d’un très inquiétant « loi électorale ». D’une main rendue fébrile par la crainte d’une catastrophe et le souvenir d’une soirée fort alcoolisée, je décachète la missive et prends connaissance de son contenu, lequel me remplit d’un sentiment d’horreur et d’impuissance. Le Tyran m’y apprend que son bon plaisir est que je me lève un dimanche de mai à sept heures du matin pour me rendre non loin de mon domicile dans un lieu où me rejoindront mes infortunés compagnons d’esclavage pour y effectuer une journée de travaux forcés.
Peste, la farce est cruelle ! Alors qu’il n’y a pas dix jours j’appelais mes concitoyens à refuser de se plier à la kafkaïenne « obligation d’exercer leur droit de vote », voilà que l’Infâme me punit d’avoir voulu le défier. Mais qu’allais-je donc faire dans cette galère ? Mon premier élan est de lui refuser mon concours. Hélas, le Malfaisant a deviné mes intentions : dans un menaçant paragraphe, il me prévient d’un ton implacable : si je refuse de me plier à sa volonté « sans cause légitime », il exercera une fois de plus sa violence à mon encontre et me forcera à lui céder deux cents euros (majorés des décimes additionnels) prélevés sur le juste salaire de mon dur labeur. Comme je doute fort que le Malveillant considère ma volonté farouche de lui nier tout droit à disposer de mon corps et de mon temps sans mon accord comme un motif légitime, il me reste à résoudre ce dilemme cornélien : la corvée ou la taille.
Et bien soit, puisqu’il me faut céder à son chantage, je me rendrai donc dans un bureau de vote pour y exercer « les fonctions qu’il m’a conférées », et je vous promets solennellement une chronique saignante à mon retour des urnes, qui s’intitulera « Les vestiaires de la démocratie ou comment laisser l’Etat dans les toilettes où vous l’avez trouvé ».
* si vous n’avez pas compris la phrase, relisez-la bien. Si vous n’en pénétrez toujours pas le sens, sachez que je rallonge à loisir mes phrases afin d’éviter d’être compris du peuple, chose qu’à l’instar de l’immense Pierre Desproges, je ne supporte pas.
Ce blog est ma petite île de bon sens dans un océan de logorrhée collectiviste. Vous y trouverez, amie lectrice (et vous aussi, ami lecteur), un point de vue libertarien sur les choses de ce monde. Afin de dénoncer l'oeuvre de désalphabétisation massive entreprise par les média traditionnels et l'enseignement étatique, j'ai pris le parti d'employer un vocabulaire châtié et une syntaxe complexe mais élégante. Puisse la lecture de ces chroniques vous être instructive et divertissante.
Et nos politiciens, d’ordinaire si prompts à s’emparer des ondes pour diffuser leur indignation de bon aloi, de multiplier les visites de courtoisie, les missions commerciales, et d’aller serrer chaudement la main d’un vieux barbu en uniforme qui leur sert un petit mojito bien tassé pour accompagner le cigare qu’il vient de leur offrir… Certains vont même jusqu’à profiter des joies d’une promenade à motocyclette sur le Malecon, indifférents à la souffrance de ce peuple qui n’a même plus le droit d’aller pêcher le poisson* dans ces eaux que notre baderne pachydermique longe juché sur son bolide vrombissant. 



